Je me souviens de ma première communion, il y a quelques années déjà : ces pas succédaient à ceux posés au cours du catéchisme de petite fille, et je les mettais dans un chemin assez étroit, même fortement limité par les non-dits des catéchistes de l’époque : le point important était de ne pas mâcher cette hostie que le prêtre allait poser sur ma langue, après la confession. Je ne me souviens pas de bouleversement particulier comme ceux dont ont parlé Ste Elizabeth de la Trinité ou Ste Thérèse de l’Enfant Jésus. La blessure de Jésus sur la Croix était le fait d’un soldat plutôt bon exécuteur d’ordres dans cette situation. Il y avait alors dans cette hostie un mystère entier très pragmatique. Il m’a fallu marcher parfois péniblement dans ce chemin que je qualifie de vicinal tant il fut (et sans doute est encore) plein d’inattendus douloureux ou interpellant, pour enfin faire le lien entre tous les dons de Jésus au cours de sa Pâque : la bonté du geste vers l’autre dans le lavement des pieds du prochain, le don de son humanité, Pain de vie pour nous, don de sa divinité par son côté transpercé qui laisse s’écouler vers nous et de son amour profond d’homme par le sang, et nous assure de son amour infini de Dieu par l’eau baptismale.
Ce chemin sinueux, d’ombre et de soleil, chemin humble comme tous les chemins vicinaux, a été et est peuplé de rencontres qui chacune m’a guidée et me guide vers la vie « à la suite » de Jésus. Vers la vie, mais pas nécessairement dans la vie, car de cet amour que Jésus m’a donné et me donne par sa Passion, qu’en fais-je au quotidien ? Si je suis un cep par mon baptême, mes sarments nourris par l’Eucharistie ne touchent pas toujours grand monde autour de moi, un autour proche ou lointain. Ils semblent être coupés trop court pour produire du fruit que mon prochain pourrait cueillir : en fait, ai-je tellement évolué depuis cette première communion de petite fille ? Bien sûr, j’accueille maintenant le Christ quand je communie, je l’accueille en vérité, en confiance de son amour donné et reçu, mais c’est plutôt pour moi que je le fais, même si c’est en toute vérité profonde. Dans ma confiance que je crois sincère quand je participe à l’Eucharistie, il y a aussi une demande de pardon pour mon manque de foi, mon retrait devant les besoins de mon prochain. J’ai conscience que mes actes altruistes sont plutôt issus de la morale que de l’amour réel que j’ai cependant pour le Christ.
Alors être « dans le Cœur de Dieu » ne signifie-t-il pas être lové dans l’assurance de cet Amour infini que la Trinité : on est bien, au chaud, en sécurité, à l’écart des questions que les besoins d’un Samaritain pourraient me poser ? Ne faudrait-il pas plutôt que je pense être en marche « vers le Cœur de Dieu » ? Une marche humble, certainement difficile car il faudrait répondre aux questions que le regard du Samaritain m’adresse. Mais ainsi je pourrais peut-être laisser mon petit chemin pour prendre l’autoroute de l’Eucharistie vécue dans un foi absolue, en vérité. Vers le Cœur de Dieu pour que mon cœur explose dans le regard de mon prochain. Le ras de marée de la foi qui m’emporterait vers l’Amour promis, beauté de la pa